Mieux protéger et garantir les droits des mineurs non accompagnés
- Adventis
- 20 juil.
- 4 min de lecture
Avis de la CNCDH du 12 juin 2025
"Peu de choses ont changé"
Le 12 juin 2025, la CNCDH (Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme) a rendu un avis, à la suite d'une saisine réalisée par des députés, sur la situation des mineurs non accompagnés en France.
Un précédent avis, datant de 2015, alertait déjà sur les conditions d'évaluation et de prise en charge des mineurs non accompagnés.
Le bilan, 10 après, est assez accablant.
La CNCDH, c'est quoi ?
Institution française ayant pour objectif de promouvoir et de protéger les droits de l'Homme, elle conseille le gouvernement et le parlement sur tous les sujets qui touchent aux droits de l'Homme.
Elle a aussi pour vocation, en tant qu'elle est accréditée par les Nations Unies, de jouer un rôle dans le contrôle des engagements internationaux de la France. Ici il s'agira plutôt de la Convention Internationale des Droits de l'Enfant.
Enfin, elle développe des outils et des actions à visée éducative : éducation à la tolérance, aux valeurs et principes inspirés par les droits humains.
La CNCDH est composée de 64 membres.
60 sont désignés par arrêté du Premier Ministre, après avis d'un comité.
4 sont membres de droit : un député, un sénateur, un représentant du Conseil économique social et environnemental, et le Défenseur des Droits.
Pour rendre un avis, la CNCDH réalise des auditions, des missions d'investigation et de terrain, notamment des visites, des auditions de publics dédiés, des questionnaires, des constatations sur place, etc.
L'avis du 12 juin 2025
Après avoir réalisé sa mission d'investigation et de terrain, la CNCDH a rendu un avis particulièrement défavorable à la France.
Elle considère que la France ne respecte pas ses engagements internationaux, et notamment la Convention Internationale des Droits de l'Enfant.
S'agissant des chiffres : les départements rechignent à les communiquer, et lorsqu'ils sont communiqués, les chiffres ne sont pas fiables.
S'agissant de l'évaluation : le temps de répit n'est pas respecté, le droit à l'accueil provisoire d'urgence n'est pas correctement respecté, aucune procédure d'accompagnement dans la reconstitution de l'état civil n'est mise en œuvre.
La CNCDH constate que les évaluateurs se laissent aller à l'analyse des documents d'état civil alors qu'ils n'ont strictement aucune compétence en la matière, et que la PAF (Police aux Frontières) est très peur fiable dans ses analyses, avec des avis parfois contradictoires.
La disparité géographique est criante : en fonction du département, les méthodes sont inadaptées et différentes, et il subsiste une difficulté avec le récit du parcours migratoires, pour lequel l'importance n'est pas la même en fonction des départements.
Les refus de prise en charge apparaissent non motivés ou très peu motivés, et en l'absence de motivation, l'arbitraire prend toute sa place. Lorsqu'ils sont motivés, nous constatons qu'il s'agit de phrases pré rédigées sous forme de copier/coller.
Enfin, la CNCDH constate qu'il est toujours recouru aux tests osseux et rappelle qu'il s'agit de tests inadaptés, très peu fiables et contraires à la dignité.
Nous constatons, quant à nous, que les méthodes ne sont absolument pas les mêmes en fonctions des médecins désignés et des départements : parfois une radio de la main, parfois un scanner des clavicules, parfois chez un radiologue, parfois chez un médecin légiste.
Il subsiste en outre une difficulté : la procédure devant le Juge des enfants est assez spécifique, mais il s'agit d'une procédure civile qui doit répondre aux dispositions générales du code de procédure civile.
Or, lorsque le Juge ordonne une expertise PAF ou une expertise médicale, il n'y a aucune convocation à une réunion d'expertise, aucune possibilité de poser des questions à l'expert, et le rapport, envoyé directement au magistrat, est très souvent entériné malgré l'absence de respect du contradictoire au cours des opérations d'expertise, et l'absence de réponse aux questions légitimement posées au Juge sur des points techniques auquel il est bien incapable de répondre.
S'agissant de l'accès aux droits, pendant la phase d'évaluation, là encore la CNCDH tire la sonnette d'alarme.
Elle préconise depuis plusieurs années le recours à l'administrateur ad'hoc dès la première présentation du jeune, afin de garantir l'impartialité, la neutralité et l'indépendance.
Rappelons que les agents des conseils départementaux qui évaluent les jeunes sont sous l'autorité hiérarchique des chefs de services, qui eux-mêmes sont chargés de mettre en œuvre la politique de l'assemblée délibérante.
De notre côté nous estimons que l'assistance par un avocat spécialiste en droit des enfants devrait être rendue obligatoire -comme c'est le cas pour les auditions libres- dès la première présentation au conseil départemental.
Nous constatons trop souvent l'inanité des entretiens d'évaluation où les questions sont parfois totalement déplacées.
Le 15 juillet 2025, nous avons découvert qu'en Haute-Saône, la question de l'équipement du logement en climatisation était systématiquement posée à chaque jeune sollicitant sa prise en charge.
Ainsi ce Conseil Départemental estime pouvoir évaluer la minorité en s'informant sur l'existence ou non de la climatisation dans le logement occupé par la famille dans le pays d'origine...
Nous constatons également que les agents évaluateurs sont parfois très mal informés sur les systèmes scolaires étrangers, qui peuvent être parfois très différents du système scolaire français, ce qui donne lieu à des incompréhensions et à des approximations qui sont toujours considérées comme des incohérences retenues à l'encontre du jeune.
En conclusions, il faut retenir de cet avis que la présomption de minorité, imposée par les engagements internationaux souscrits par la France, n'est pas respectée.
La CNCDH recommande la création d'une "instance interministérielle pérenne et indépendante" pour permettre un "pilotage politique harmonisé, stable et engagé en faveur de tous les enfants", et qu'il s'agit là d'une urgence.
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